
Parcours d’achat client : comment adapter votre communication selon le niveau de conscience de son besoin
4 juin 2025« Les gens oublieront ce que vous avez dit, mais jamais ce que vous leur avez fait ressentir. »
L’acte d’achat, une décision (très) peu rationnelle
Lorsqu’on élabore une stratégie marketing ou une communication de marque, on parle souvent de positionnement, de visibilité, d’objectifs business.
Mais il y a un ingrédient qu’on oublie trop souvent dans la recette. Celui qui donne du goût. Qui fait la différence.

L'émotion.
Tel le sel dans votre plat, oublier l’émotion dans votre communication serait une erreur.
Pourquoi ? Parce que l’être humain n’achète pas uniquement avec sa tête.
Il n’achète pas seulement le produit que vous proposez pour ses caractéristiques ou pour son prix. Il achète ce que votre marque lui fait ressentir.
Une projection, une promesse, une sensation.
Ce n’est pas un ressenti flou mais bien une réalité mesurée. Ce qui capte, séduit et fidélise… c’est l’émotion.
Selon Gerald Zaltman, professeur à la Harvard Business School, 95 % des décisions d’achat sont inconscientes. Elles sont prises dans l’instant, sous l’impulsion d’un souvenir, d’un mot, d’une atmosphère. Autrement dit, nous décidons avec nos émotions puis nous justifions avec notre raison.
Et si l’émotion est absente, l’engagement l’est souvent aussi.
Pourtant, l’émotion reste trop peu mobilisée dans les stratégies de marque, souvent au profit d’arguments purement fonctionnels ou de discours formatés (encore plus avec l’IA aujourd’hui).
Cela fait partie des points que je réfléchis au quotidien avec les clients que j’accompagne :
- Comment activer les bons leviers émotionnels dans sa communication ?
- Comment construire une identité de marque qui touche et qui fédère ?
- Comment faire en sorte que votre contenu ne soit pas juste lu, mais ressenti ?
Et si on arrêtait de sous-estimer cette part invisible, mais décisive dans la construction d’une marque ?
Dans cet article, nous allons voir ensemble pourquoi les émotions sont le vrai moteur de l’acte d’achat, comment les grandes marques (et les plus petites) les utilisent avec finesse…
Et surtout, comment vous pouvez, vous aussi, en faire un pilier de votre stratégie !
1. Pourquoi les émotions pèsent (très) lourd dans l’acte d’achat.
Ce que dit la science cognitive
Pour comprendre pourquoi les émotions ont autant de poids dans les comportements d’achat, il faut revenir à la manière dont notre cerveau fonctionne.
Nos cerveaux sont programmés pour aller vite. Et pour cela, ils utilisent des raccourcis émotionnels.
Le psychologue Daniel Kahneman (prix Nobel d’économie) distingue deux systèmes de pensée :
Système 1 : Rapide, intuitif, émotionnel.
Système 2 : lent, analytique, rationnel.
Or, c’est le Système 1 qui prend la main dans 90 % des situations du quotidien, y compris lorsqu’il s’agit de prendre des décisions d’achat (Kahneman, Thinking, Fast and Slow, 2011).
Autrement dit, ce n’est pas notre cerveau analytique (celui qui lit les comparateurs de prix) qui décide. C’est celui qui ressent.
Celui qui associe une couleur à un souvenir. Un mot à une sensation. Une image à un besoin profond.
Ces éléments déclenchent des micro-réactions émotionnelles qui influencent le comportement, bien avant que l’on analyse le prix ou les caractéristiques du produit.
fois plus susceptibles de recommander une marque si elle leur procure des émotions
Selon l’étude “The New Science of Customer Emotions” (Harvard Business Review, 2015), les consommateurs émotionnellement engagés sont trois fois plus susceptibles de recommander une marque et achètent deux fois plus fréquemment que les autres.
2. Quelles émotions véhiculer selon votre marque ?
Toutes les émotions n’ont pas le même effet, ni la même fonction.
Certaines attirent, d’autres engagent, d’autres encore fidélisent — parfois même en dérangeant.
Voici celles que l’on retrouve le plus souvent dans l’univers de la communication, du marketing émotionnel et de la construction de marque et ce qu’elles inspirent.
Exemple : la marque Innocent utilise l’humour, des visuels naïfs et un ton complice pour provoquer de la joie.
Résultat : une communauté fidèle, des publications très partagées et une image de marque chaleureuse.
💡 À activer si votre marque veut inspirer la légèreté, la joie de vivre, le bien-être ou l’optimisme.
Exemple : les assurances, les systèmes de sécurité ou encore les outils de cybersécurité jouent souvent sur ce levier. Norton ou Bitdefender, par exemple, insistent sur les risques (vol de données) avant de rassurer avec leur solution.
💡 À manier avec précaution, et dans des univers liés à la sécurité, la santé ou la prévention.
Exemple : Loom, Patagonia ou Team For The Planet dénoncent des pratiques industrielles ou écologiques insoutenables. Leur message, parfois frontal, génère un fort sentiment d’identification chez les consommateurs engagés.
💡 À activer si votre marque a une mission de transformation ou une posture activiste assumée.
Exemple : de nombreuses campagnes d’ONG ou de fondations caritatives utilisent cette émotion pour sensibiliser (ex : Fondation Abbé Pierre, UNICEF).
Mais certaines marques commerciales peuvent aussi activer cette émotion avec subtilité, pour raconter des histoires vraies, humaines, qui marquent.
💡 Idéal pour les marques à forte dimension sociale ou relationnelle.
Exemple : Duolingo s’est imposée comme une référence en matière de marketing inattendu sur TikTok.
La marque joue à fond la carte de la surprise et du second degré avec sa mascotte, le hibou vert, qu’elle met en scène dans des situations absurdes, décalées… parfois même borderline.
Résultat : des millions de vues, une base d’abonnés ultra-engagée, et une image de marque drôle, imprévisible, et résolument virale.
Exemple : En choisissant de produire moins mais mieux, de militer pour la planète et d’investir ses bénéfices dans la préservation de l’environnement, Patagonia active un puissant sentiment d’identification. Les clients ne consomment plus une marque, ils défendent une cause.
💡 À activer si vous souhaitez créer une communauté autour de votre mission ou de vos valeurs.
3. L’émotion, tel un fil rouge d’une marque forte
Créer une identité de marque ne consiste pas uniquement à définir des couleurs, un logo ou une promesse marketing. C’est une expérience émotionnelle globale, ressentie à chaque interaction et dans chaque communication.
Comme je le partageais dans cet entretien pour Mbonglet Communication, tout l’enjeu est de traduire les fondamentaux de la marque — vision, valeurs, posture — en ressenti émotionnel et que cela fasse écho à l’autre.
“Traduire une identité de marque en émotions dans ses messages, c’est tisser un lien intime avec son audience. C’est être authentique, cohérent et oser raconter une histoire dans laquelle chacun peut se reconnaître.”
Cette cohérence émotionnelle s’incarne dans :
Le ton de voix
- complice, engagé, pédagogique…
L’univers visuel
- formes, couleurs, typographies...
Les canaux choisis
- du digital au print, de l’oral à l’écrit…
L’expérience client
- avant, pendant et après l’achat.
4. Comment intégrer concrètement les émotions dans votre communication ?
Voici quelques pistes concrètes pour faire de vos émotions une stratégie :
1. Racontez des histoires (storytelling)

Le récit est l’un des véhicules émotionnels les plus puissants. Une bonne histoire touche, inspire, fait réagir, résonne en l’autre. Ce terme, très à la mode en ce moment, peut vous paraître galvaudé : on met du storytelling à toutes les sauces. Mais n’est pas conteur qui veut ! Utilisé à bon escient avec vos valeurs, votre histoire et selon le ton défini pour votre marque, votre histoire prendra une toute autre saveur. Alors plutôt douce ou épicée ?
Vous pouvez raconter :
- Vos débuts et vos erreurs (vulnérabilité = authenticité)
- Des faits marquants, des événements qui vous ont amené à prendre certaines décisions.
- Des situations vécues par vos clients (témoignages)
- Vos choix et valeurs (pourquoi vous faites ce que vous faites)
2. Travaillez votre univers sensoriel

L’émotion passe aussi par les sens : vue, toucher, sonorités…
- Les couleurs évoquent des humeurs (bleu = sérénité, rouge = urgence…)
- Les mots activent des sens (“croquant”, “chaleureux”, “étincelant”)
- Les typographies, les espaces blancs, les pictos… influencent la perception de sérieux ou de créativité.
- Vos formats contribuent à accentuer votre univers sensoriel (vidéo immersive, carrousel narratif, podcast…)
À retenir : une image est traitée 60 000 fois plus vite qu’un texte par le cerveau (MIT, 2014).
3. Humanisez votre marque

L’émotion naît dans la relation humaine. Plus votre marque est incarnée, plus elle suscite de la proximité.
- Montrez votre visage ou celui de votre équipe (attention un accord préalable de vos équipe est nécessaire - RGPD oblige !)
- Vous pouvez utiliser le “je” ou le “nous”, plus engageant,
- Vous pouvez partager vos valeurs, vos partis pris, vos ressentis (avec subtilité).
Bien que ce ne soit pas la chose que j'affectionne le plus, j'ai compris qu'en montrant mon visage de temps en temps, cela pouvait m'aider à humaniser ma communication. Disons que j'utilise mon image avec parcimonie !
4. Travaillez la constance émotionnelle

La clé d’une marque émotionnellement forte, c’est la cohérence. Une même tonalité doit se retrouver sur tous vos canaux. Si vos visuels sont chaleureux, mais vos mails froids et impersonnels… ça casse l’effet émotionnel.
La cohérence rassure. L’incohérence trouble.
Posez-vous ces questions :
- Est-ce que le ton de ma newsletter est le même que celui de mon site ?
- Est-ce que ma charte graphique véhicule l’émotion souhaitée ?
- Est-ce que le parcours client (de la 1ʳᵉ visite au SAV) est fluide et agréable émotionnellement ?
5. Votre communication manque d’émotions ? Que faire ?
Quand je travaille avec un client sur l’alignement de sa marque, voici ce que je peux lui demander :
- Quelle émotion principale souhaitez-vous provoquer ?
- La ressent-on dans votre contenu ?
- Si oui, comment l’utilisez-vous ?
- Comment amplifier cette dimension dans vos prochains contenus ?
Si vous ne savez pas par où commencer, vous pouvez utiliser des outils comme le prisme de Kapferer, ou encore les cartes d’émotions utilisées en UX et communication sensorielle.
Ce que votre marque fait ressentir a plus de poids que ce qu’elle promet.
L’émotion n’est pas un accessoire marketing. C’est le cœur de l’expérience client, la base d’une relation pérenne.
C’est elle qui transforme une promesse en souvenir, un achat en adhésion, une marque en communauté.
Alors, au-delà de ce que vous proposez...
Qu’est-ce que votre marque fait ressentir aujourd’hui ?
Et que voudriez-vous qu’elle fasse ressentir demain ?